Ayant entendu parler du fameux verger aux tulipes de Villebramar, nous voilà partis à environ 35 km de Villeneuve sur Lot dans le Lot et Garonne pour rechercher la fameuse Tulipe d’Agen (Tulipa agenensis). A l’entrée du verger, nous sommes accueillis pas un panneau pédagogique sensibilisant le public à la disparition de cette espèce et par conséquent qu’il est interdit de la cueillir et de piétiner les feuilles.
Nous décidons d’aller sonner chez le propriétaire pour lui demander l’autorisation d’aller dans son verger et gentiment il décide de nous accompagner en nous racontant l’histoire des ses tulipes. Lorsque l’on rentre dans son verger, un joli tapis rouge écarlate s’étale entre les rangs de pruniers en fleurs, c’est magnifique. Monsieur Gessely, pruniculteur à la retraite a été un véritable précurseur dans la protection des tulipes. Dans les années 60, il décide d’adapter l’ensemble des ses techniques culturales (fauchages, désherbages, récoltes de prunes etc.…) aux exigences de Tulipa agenensis. Il nous explique que la qualité des ses prunes était satisfaisante et qu’il n’a eu à déplorer aucunes dépenses supplémentaires, ni pertes de revenus. Ainsi entretenu et préservé par Monsieur Gessely, le verger à tulipes de Villebramar a fait l’objet en 1995 d’une convention de gestion signée avec le CREN Aquitaine avant d’être vendu à ce dernier en 2005. Depuis 2005, un plan de gestion du site définit les mesures nécessaires au maintien du verger et des quelques centaines de pieds de tulipes d’Agen (période du travail du sol, usage modéré des produits phytosanitaires sélectionnés…). Monsieur Gessely nous a fait part avec regret que malgré le panneau explicatif et sa vigilance, il existe encore des actes de vandalisme (cueillette, arrachage des bulbes..). La fermeture physique de ce site de 1,63 hectares par du grillage et son classement réglementaire sont donc inévitables et favorables à la préservation de ce site majeur dans le Lot et Garonne.
Tulipe d'Agen (Tulipa agenensis). Villebramar (47). 29 Mars 2009.
A l’origine, la tulipe d’Agen aurait été introduite il y a plus de 2000 ans par les romains qui eux-mêmes l’auraient importée de l’Empire d’Orient. En France, on la rencontre encore en Aquitaine (surtout en Lot et Garonne et Gironde) et dans les régions Midi-Pyrénées et Provence-Alpes-Côte d’Azur où elle est en très forte régression. Cette plante bulbeuse haute de 25 à 40 cm est souvent nommée « Œil de soleil » du fait de l’étoile jaune caractéristique dessinée au cœur de la fleur.
Le Sud-ouest de la France héberge principalement 3 espèces de tulipes : la tulipe d’Agen (T.agenensis), la tulipe précoce (T.raddii, anciennement T.praecox) et la tulipe sylvestre (T.sylvestris). Au fil des siècles, ces plantes se sont adaptées et ont colonisé les terres cultivées. Mais avec l’évolution des pratiques culturales (cultures de printemps, labours profonds, utilisation massive d’herbicides…), de l’urbanisme et de la cueillette sauvage ; le nombre de stations a énormément diminué. Tulipa agenensis, T. raddii, T. sylvestris ssp sylvestris bénéficient d'arrêtés de protection nationale, mais malheureusement la protection ne concerne aucunement les plantes situées en terres cultivées ce qui est aberrant.
Une étude réalisée par le CREN Aquitaine en 1997/98 a permis de recenser près de 60 sites agricoles à Tulipes sauvages, dont 50 de tulipes d’Agen. Cela pourra inciter d’autres communes à participer elles aussi à la préservation des tulipes sauvages.
Tulipe d'Agen (Tulipa agenensis). Villebramar (47). 29 Mars 2009.
La préservation des ces tulipes passent avant tout par la sensibilisation et l’information d’un public large. Il faut concilier les intérêts des agriculteurs et la conservation des tulipes en faisant prendre conscience aux gens ce patrimoine naturel menacé, ce qui n’est pas toujours facile... Il faut former les agents d’entretiens à faucher de manière raisonnée et à reconnaître les espèces protégées, inciter les agriculteurs à avoir recourt à une agriculture plus respectueuse de l’environnement (limitation de désherbants chimiques ou désherbage mécanique, travail de la terre en dehors des périodes de floraison et de fructification des tulipes…) et expliquer au grand public pourquoi la cueillette met en péril cette espèce. Il y a du travail !
Tulipe d'Agen (Tulipa agenensis). Villebramar (47). 29 Mars 2009.