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25 septembre 2009 5 25 /09 /septembre /2009 13:42
    Il arrive souvent dans le Sud-Ouest que des personnes s'intéressant plutôt de loin à l'herpétologie (l'étude des reptiles et des amphibiens) rencontrent la "Couleuvre de Montpellier" (de son petit nom latin Malpolon monspessulanus), aussi bien en Aquitaine qu'en Midi-Pyrénées. Je ne sais pas pourquoi cette couleuvre là en particulier figure dans les fantasmes d'identifications collectifs (sa taille? son caractère venimeux, bien que limité car opistoglyphe?), mais cela devient problématique si personne ne s'oppose avec une certaine argumentation à ce mythe. Sans appui scientifique, il est difficile de contredire les personnes persuadées que la Couleuvre de Montpellier est bien présente en Aquitaine car ils tiennent ça "d'un ami qui connait la cousine d'une soeur qui connait quelqu'un qui lui s'y connait en serpents". D'ailleurs, je ne suis pas loin de penser que ce genre d'arguments entraine également une sur-estimation de la répartition des vipères en france, mais cela est un autre sujet.
    Quoiqu'il en soit, cette problématique reprend véritablement naissance il y a quelques jours, lorsque la très chouette base de données naturalistes faune-aquitaine.org met en ligne la possiilité de transmettre les observations de batraciens et de reptiles. Hélas, je fus très étonné (et déçu) de voir la Couleuvre de Montpellier dans la liste des entrées disponibles. Souhaitant lancer un débat sur le sujet et avoir quelques explications, la seule réponse fut une blague concernant "le réchauffement climatique et les transports" et quelques données "biblios plus ou moins suspectes". Complètement amateur, mon avis a peu d'impact, je le sais, et j'ai donc souhaité avoir la reflexion de Gilles Pottier, membre de la SHF et herpétologue à l'association nature Midi-Pyrénées, déjà à l'origine d'un article SHF démontrant "que les éléments disponibles ne permettent pas d'affirmer la présence de la Couleuvre de Montpellier en région Midi-Pyrénées" (référence et document pdf en toute fin de cet article). Même si cet article d'un bulletin de la SHF contient déjà une très belle argumentation qui démontre "que les éléments disponibles actuellement tendent en faveur" de l'absence de populations viables (voire même non viables) de Couleuvre de Montpellier hors de la "vraie" zone méditéranéenne, il est important d'avancer des arguments qui concernent spécifiquement la région Aquitaine. Gilles Pottier le fait, répondant même à ce qui tient de la "blague", qui pour certains pourraient ne pas l'être et mérite donc une argumentation.
     Je tiens également à préciser qu'il ne faut pas voir dans cet article une quelconque "critique non constructive " de ce superbe outil qu'est Faune-Aquitaine, mais une amélioration qui permet de ne pas alimenter un mythe déjà trop fourni et pas assez documenté. Enfin, si ce "débat" est ici rendu public et pourrait étonner, c'est pour une très simple et bonne raison: il constituera une des entrées disponible lorsque l'on tape "aquitaine couleuvre de montpellier". Toute personne désireuse de s'informer pourra donc lire cette argumentation et ne pas propager l'idée que cette présence est déjà justifiée et prouvée, et évitera surement des confusions avec de grosses Couleuvre à collier ou autre (je vous renvoie encore une fois à l'article SHF de fin d'article).

Mail reçu et transmis avec son autorisation de Gilles Pottier concernant l'hypothétique présence de la Couleuvre de Montpellier Malpolon monspessulanus en Aquitaine (Gironde 33, Landes 40, Dordogne 24, Lot-et-Garonne 44 et Pyrénées-Atlantiques 64):

"Cher XXX,

le réchauffement climatique ne constitue pas un argument valide :
Malpolon monspessulanus est absente d'Italie à 99 % (pays à climat authentiquement méditerranéen, pourtant) malgré la connexion physique de l'Italie avec des zones occupées par l'espèce.
Pourquoi ? Parce que ce pays est occupé par
Hierophis viridiflavus (Couleuvre verte et jaune), qui lui oppose manifestement un solide obstacle. 

Cela signifie que 2 facteurs au moins doivent être réunis :

1) abiotique : le climat doit être méditerranéen (d'autant plus véritablement méditerranéen qu'on est en limite nord de répartition : spermatogénèse printanière de
Malpolon monspessulanus)

2) biotique : la Couleuvre verte-et-jaune doit être absente

AUCUN de ces deux facteurs n'est présent en Aquitaine.

En France, où elle est en limite nord de répartition, la limite de la Couleuvre de Montpellier se situe à l'intérieur du domaine méditerranéen ou à sa limite même. Pas à l'extérieur. De surcroît,
Hierophis viridiflavus pénètre dans le domaine méditerranéen alors que Malpolon monspessulanus ne pénètre pas en domaine atlantique (nous parlons toujours ici du contexte de limite nord. Nous ne sommes pas au Maroc ni au sud de l'Espagne mais dans le sud de la France). Identifier la logique des couches de facteurs physiques ...

La présence de la Couleuvre de Montpellier au sein du menu déroulant de "Faune aquitaine" est donc, à mon avis, tout à fait injustifiée.

Une attitude cohérente, étant donné les arguments avancés par ceux qui ont décidé de mettre la Couleuvre de Montpellier dans cette liste, consisterait d'ailleurs à y faire figurer tous les taxons méditerranéens connus. Est-ce le cas ? Si ce n'est pas le cas, alors cette liste peut être soupçonnée d'incohérence.

Tu peux diffuser l'article si tu le souhaites, aucun problème. En précisant la ref. Je t'y invite même vivement : nous l'avons écrit pour précisément éviter ce genre d'égarement.
(cf lien en fin d'article)

Je ne le répèterai jamais assez, même si c'est extrêmement lassant : en Midi-Pyrénées, si on avait dû faire figurer un point dans chaque maille où de la Couleuvre de Montpellier nous a été signalée par des observateurs catégoriques, on aurait eu plusieurs points dans chaque département de la région. Cela aurait eu pour effet de faire croire à la présence avérée de la Couleuvre de Montpellier dans ces zones. Cette croyance aurait elle-même entraîné de nouveaux signalements sur le mode "ça devait être elle puisqu'elle y existe". Idem pour d'autres espèces, d'ailleurs : Lézard agile, Vipère péliade ... Catastrophe assurée.  

La Couleuvre de Montpellier est REGULIEREMENT signalée dans le Sud-Ouest par des observateurs catégoriques (écartons d'emblée les signalements jugés douteux par les observateurs eux-mêmes).

Ces observateurs catégoriques ne sont JAMAIS des herpétologues compétents et expérimentés.

Ces observateurs catégoriques ne fournissent jamais de preuves permettant d'homologuer leurs observations.

Les herpétologues compétents et expérimentés n'observent jamais ce serpent (ni ses mues, ni aucun cadavre) dans le Sud-Ouest, alors même qu'ils observent chaque année un nombre bien plus élevé de serpents que quiconque. Statistiquement, il y a comme un problème.

Ces mêmes herpétologues compétents et expérimentés observent facilement et couramment la Couleuvre de Montpellier dans les zones où des preuves de son existence sont régulièrement fournies. Ils savent donc la voir, de toute évidence.

Le "cas"
Malpolon monspessulanus dans le Sud-Ouest relève de la psychologie et de la sociologie ... Bien moins de la zoologie (je ne parle pas de cryptozoologie, cette discipline étant d'une inutilité absolue : soit un animal existe et il relève de la zoologie, soit il n'existe pas et il ne relève de rien).

Bien sûr, des introductions sont toujours possibles. Encore faudrait-il avoir là aussi des preuves (les animaux introduits ne sont pas immatériels. Ils sont à ce titre tout à fait photographiables. Et d'autant plus aisément photographiables qu'ils constituent des populations viables. Or, à moins d'ajouter à la liste des entrées "Python royal" "Iguane vert" etc, on va sagement se limiter à des populations viables, hein ?).

Gilles."

Article en PDF (cliquer sur le lien):
Pottier G., Vacher J.-P. et Savine N. 2007 - Interrogations sur l'existence contemporaine de la Couleuvre de Montpellier Malpolon monspessulanus (Hermann, 1804) (Reptilia, Colubridae) en région Midi-Pyrénées (France). Bull. Soc. Herp. France 120 : 33-56.
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commentaires

H
Bonjour la competition interspecifique opposant malpolon a hierophis viridiflavus constitue t' elle reellement un obstacle majeur . Etant donné qu en afrique du nord des serpents proches comme<br /> hierophis hippocrepis (convergent) et malpolon sont souvent sympatriques .Si tel est le cas serais ce a cause d un pouvoir reproducteur plus elevé
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R
<br /> <br /> L'espèce "hippocreppis" n'appartient pas au même genre que Hierophis viridiflavus (mais au genre Hemorrhois). On ne peut pas comparer ces deux espèces avec les deux espèces françaises. En France,<br /> elle n'ont pour l'instant encore jamais été trouvées en sympatrie.<br /> <br /> <br /> <br />
R
<br /> Bonjour, avez-vous une photo? Si elle habite votre jardin, vous devriez pouvoir en avoir une. Après analyse de la photo, je pourrez vous donner l'espèce de votre jardin. Veillez à prendre une photo<br /> de chez vous juste après, et nous vérifierons l'espèce, la localité, et la date avec les exifs. Sans ça, ce n'est qu'un témoignage orale (et ici écrit) qui ne vaut guère plus que celui du Yéti, du<br /> mokele-mbembe ou du montre du Loch Ness.<br /> <br /> <br />
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B
<br /> Bonjour ,<br /> nous habitons le lot et garonne (aquitaine) et avons La Couleuvre de Montpellier dans notre jardin depuis deux ans.<br /> c'est tout.<br /> <br /> <br />
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R
<br /> Je ne demande qu'à vous croire, mais il faut une preuve irréfutable pour ce genre de données, peu importe la verve qu'on essaye d'y mettre (la mienne, ou la votre).<br /> <br /> A bientôt.<br /> <br /> <br />
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M
<br /> Mea culpa. Prétendre ne rien connaître et affirmer, c'est pour moi la définition de constater. Certes, nombre de prétentieux soi-disant spécialistes pédant réfutent à coup d'arguments<br /> "scientifiques" les constatations de néophytes qui eux arpentent le terrain loin des laboratoires poussiéreux.<br /> Preuve en est la gestion du H1N1 par des gens de votre acabit...<br /> Redescendez sur terre avant d’invectiver les autres avec mépris...<br /> Non, je ne suis pas cryptozoologue, et ne lit pas en diagonale. Seulement, je ne connais rien aux étoiles, mais je peux affirmer qu’il y en a plein le ciel...<br /> <br /> <br />
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